La nouveauté que le Centre grégorien Saint Pie X met en avant en cette année 2012 est une meilleure adéquation entre son organisation pédagogique et les attentes des élèves choristes et chefs de chœur.

En plus des deux degrés « Choristes » et des trois degrés « Direction », le Centre grégorien propose des cursus différenciés selon les objectifs de chacun, selon les acquis de chacun, selon les aptitudes de chacun. Des cursus « modulaires » : c’est le mot que les professeurs du Centre ont choisi pour exprimer ce désir de coller au plus près aux attentes des choristes.

Voici le fruit de leurs réflexions et les nouveaux cursus qui en ont résulté dès l'année 2012.


Présentation des modules

1° Module « Écriture musicale »

Le module « écriture musicale » est étudié en 1er degré, au tout début du cursus ; il a pour but de familiariser les choristes avec les particularités des signes de nos partitions grégoriennes : notes, signes rythmiques, nuances...

En effet, le chant grégorien possède une écriture très originale qui intrigue quand on n'en connaît pas les secrets, et qui séduit par la richesse de ses informations quand on en découvre les principes : la forme des notes, leur regroupement en neumes formant un petit tout musical avec son caractère propre, les nuances qu'ils indiquent... Il s'agit donc de comprendre ce qui est écrit et d'apprendre à le chanter en étant fidèle aux nuances les plus variées.


2° Module « Chant, technique vocale »

Ce module est au cœur des deux années du cursus choriste du Centre Grégorien St Pie X. Il vise à acquérir les savoir-faire nécessaires aux choristes liturgiques.

Cela débute par une forte sensibilisation au travail de la voix. Il ne s’agit pas de remplacer le long apprentissage de la technique vocale, mais, sous la direction d’un professeur de chant, d’identifier les qualités et les défauts vocaux et de donner des pistes d’amélioration à chacun. Le professeur de chant est présent durant certaines répétitions pour combattre les défauts vocaux du chœur à l’aide d’exercices adaptés : respiration, économie du souffle, placement et timbrage des voix, techniques de legato, enchaînements des notes et des syllabes, techniques de crescendo et decrescendo, etc.

Ensuite ce module s’appuie sur les acquis des autres modules d’apprentissage du solfège, du rythme grégorien, de la modalité, pour permettre le déchiffrage des pièces du répertoire puis pour développer le travail d’interprétation de ces pièces. On y apprend à comprendre la chironomie (geste de direction) du chef et à savoir la reproduire vocalement dans une interprétation juste. On se familiarise avec les particularités du rythme grégorien par une pratique alliant rigueur et souplesse. On travaille à créer le phrasé demandé tout en y intégrant toutes les particularités du rythme local. On apprend à exécuter la synthèse rythmique du texte latin et de la mélodie. On cherche à former un chœur uni par l’écoute mutuelle et grâce à un temps suffisant accordé à l’apprentissage de chaque pièce.

Tout au long de la semaine de travail, on vise enfin à acquérir les éléments du style d’interprétation issu de la grande école de Solesmes.

Les pièces préparées sont chantées par les choristes du module au cours des offices.

Ce module peut être renouvelé à l’envi… Il s’adresse bien sûr aux choristes, mais aussi aux futurs chefs de chœurs qui du fait de leurs connaissances musicales antérieures ne suivraient pas un cursus choriste complet. En pratiquant avec les choristes, ils découvriront ce que sera ensuite leur travail régulier à la tête de leur chœur.


3° Module "Mot latin"

La langue latine a quelques particularités qu'il faut connaître pour la chanter avec toutes ses richesses. Sa prononciation est spécifique au latin liturgique, et chaque mot est parcouru par un courant d'accentuation qui s'organise à partir de l'accent tonique, sur un système binaire d'accents secondaires. Suivant la place de cet accent tonique dans le mot, son caractère intensif pourra être plus prononcé, ou plus léger. Sur le plan rythmique, le mot possède donc un rythme qui va entrer en contact avec le courant d'accentuation ; le mot prend alors des couleurs propres qu'il faut apprendre à exprimer et que le rythme donné par la mélodie va encore nuancer. C'est le jeu de toutes ces interactions qui est étudié, en commençant par le mot isolé dépourvu de mélodie, aux premiers degrés choriste, puis , en direction, la phrase latine avec sa mélodie et son rythme musical dans le module « qualification des notes structurantes ».



4° Module "Structure"

Contrairement à la musique classique où la structure est relativement constante pour un morceau donné (rythme binaire, ternaire, quaternaire avec un découpage du temps en mesures), en grégorien, il n'y a pas de rythme fixe, celui-ci étant librement laissé au choix du compositeur qui combine le binaire et ternaire selon son goût, sans qu'il y ait de signe particulier indiquant ces rythmes.

L'identification des temps composés binaires et ternaires est indispensable pour obtenir un chant rythmé, c'est-à-dire qui donne au premier temps sa valeur structurante, d'ancrage du chant, et aux autres temps leur valeur ornementale, plus légère.

La difficulté consiste donc à retrouver les temps composés binaires et ternaires, et donc de savoir reconnaître chaque premier temps de ces temps composés binaires ou ternaires, c'est à dire savoir reconnaître les notes structurantes, ce qui, en plus de donner à chaque temps sa vraie valeur rythmique, permet d’avoir des repères nécessaires au chant en commun sous la direction d’un chef de chœur.

C'est au cours du premier degré de chant grégorien que l'on apprend à trouver la structure d'une pièce, selon des règles précises, afin que le chant soit bien rythmé et ordonné.


5° Module "Qualification des notes structurantes"

Comment interpréter, puis diriger, du grégorien ? Cette première approche des éléments qui constituent l'analyse rythmique d'une pièce de chant grégorien s'adresse au premier degré de direction. Ce n'est qu'une première étape sur laquelle vont s'appuyer bien d'autres éléments étudiés dans les degrés suivants.

Après avoir appris dans le module "Structure" à identifier les différents temps composés binaires et ternaires de la pièce, il s'agit de trouver le caractère propre de toutes les notes qui structurent le rythme de la phrase musicale. En effet, chaque note structurante, selon la mélodie et le texte, peut avoir une valeur d'appui rythmique, source plus ou moins dynamique d'élan, ou au contraire de posé rythmique, apaisement plus ou moins sensible de la mélodie.

De cette façon, l'élève chef de chœur apprend à placer les tensions et les détentes du chant, en donnant leur vraie valeur à chacun des temps composés formant le rythme, qu'ils soient binaires, ternaires, et parfois au-delà, quand l’écriture manuscrite des neumes le demande.


6° Module « modalité »

Un mode est défini par une échelle de sons (degrés utilisés) déterminée par la répartition de ses intervalles (tons et demi-tons).

Une hiérarchie régit les différents degrés de l’échelle (notes modales).

Le répertoire grégorien emploie des formules caractéristiques qui aident à reconnaître le mode utilisé.

À la diversité des modes sont associés divers états de l’âme qui permettent de pénétrer plus profondément dans l’atmosphère d’une pièce. La connaissance du mode de chaque pièce et des éventuelles modulations (changement de mode) sont un guide précieux pour le chanteur et le chef de chœur.

En 1er degré choriste seront abordées les échelles, les formules caractéristiques et les notes-clés de chacun des modes, illustrées par la pratique vocale et des exercices auditifs.

En 2e degré, l’apprentissage et la mémorisation des intonations psalmodiques, des exercices de polyphonie modale, développent cette connaissance.

Dans les degrés de direction sera abordée l’analyse des pièces d’un point de vue modal qui apportera de l’aide pour une meilleure interprétation.


7° Module "Chironomie"

Le chant grégorien est un chant choral qui nécessite une direction particulière, adaptée à ses principes rythmiques et à la grande variété comme à la finesse de ses nuances. Après avoir appris à tirer d'une pièce grégorienne tout ce qu'elle recèle, le chef de chœur doit en concevoir la direction, la dessiner sur la partition et l'exprimer par un geste des mains, la chironomie, de façon à être compris et suivi par les choristes. 

Cette formation complexe se fait par étapes. Le premier degré des chefs de chœur initie à la conception rythmique de la direction avec quelques nuances élémentaires ; ce degré enseigne également à dessiner cette chironomie sur la partition et à en réaliser techniquement le geste, pour soi, sans personne en face, dans le seul but de le rendre précis, souple et expressif. Au deuxième degré, la conception s'enrichit de la prise en compte d'un nombre croissant de nuances, identifiées dans la mélodie et le texte, avec un geste qui doit acquérir de l'autorité et de l'expressivité en face d'un chœur. Quant au troisième degré, il s'agit de perfectionner toutes les étapes pour parvenir à une chironomie fidèle à la partition enrichie de la lecture des manuscrits, et qui sache conduire le chœur, le corriger et lui faire exprimer toutes les nuances voulues.


8° Module « Psalmodie »

La psalmodie intéresse le chanteur grégorien à deux titres : psalmodier c'est prier Dieu avec les mots mêmes de Dieu grâce à de longs poèmes inspirés ; de plus, la psalmodie ayant été la matrice des mélodies grégoriennes, psalmodier c'est mettre nos pas dans ceux de nos ancêtres. La pratique régulière du chant des psaumes permet de pénétrer au cœur même de la prière grégorienne. L'enseignement de la psalmodie comprend deux parties séparées et complémentaires :

- La première est l'apprentissage du chant du texte sur une seule note. Elle est commune à la psalmodie recto tono et à la psalmodie ornée, et consiste :

- à dire les mots distinctement, sans oublier de syllabe, et en mettant leurs accents toniques en relief, "à la crête des vagues",

- à bien calibrer les pauses qui sont au nombre de deux, l'une au milieu du verset et l'autre au changement de verset.

Cette partie présente quelques difficultés et est souvent négligée dans le travail des chorales grégoriennes.

- La seconde, propre au chant orné, s'intéresse aux trois petits groupes de notes qui ornent chaque verset :

le début du verset, appelé « intonation »,

la fin du premier hémistiche (première moitié du verset),

la fin du second hémistiche (seconde moitié du verset).

Sa difficulté consiste à savoir répartir ces quelques notes sur les syllabes de l'intonation, et sur celles de la fin des hémistiches (les cadences).

« Ce à quoi nous dispose tout le système psalmodique, c'est à la contemplation toute pure, chaude, aimante, intérieure, pensée, voulue. » Dom Gajard.


9° Module « Paléographie »

Dans les éditions des livres que nous utilisons habituellement, les neumes ont été représentés sous la forme de jeux de construction analogues aux légos de notre enfance. C'était une des conditions de diffusion de ce chant jusque dans les plus humbles paroisses. Cette option simplificatrice n'a qu'imparfaitement permis de reproduire la finesse des graphies des manuscrits les plus anciens. Nous estimons que le chef de chœur doit être à même de savoir lire ces neumes anciens et de les interpréter afin d'améliorer sa sensibilité grégorienne personnelle et d'affiner l'interprétation de son chœur.

Les trois niveaux de formation à la direction du chant grégorien comportent ainsi un apprentissage à la lecture et à l'interprétation des principales graphies des manuscrits :

En 1er degré de direction : graphies à deux ou trois notes sous leurs formes simples,

En 2e degré de direction : graphies à deux ou trois notes sous leurs formes complexes, et graphies simples de plus de trois notes,

En 3e degré de direction : graphies complexes de plus de trois notes, neumes spéciaux et « lettres significatives ».

À noter qu'il n'est pas dans l'intention du Centre grégorien St-Pie X de former des spécialistes en paléographie.