Pour le mois d’octobre, ce fascicule est un peu hétéroclite, il rassemble quelques cantiques à la Sainte Vierge, connus ou non. Quelques cantiques déjà présents dans les fascicules 1 et 1bis n’ont pas été reproduits ici. C’est l’occasion de présenter quelques nouveaux auteurs de cantiques. En effet, toutes les mélodies ne sont pas anonymes et de tradition populaire ancestrales, certaines sont de facture plus récente.

Une mélodie populaire

Ce fascicule présente une mélodie populaire tout de même : “De concert avec les anges”. La facture en est très simple, le livre des accompagnements de Besnier en donne une harmonisation très agréable avec une petite introduction à l’orgue. En raison de la simplicité du rythme, il faudra veiller tout particulièrement à ne pas hacher le chant en coupant toutes les quatre notes. Les liaisons sont indiquées à cet effet et vous noterez que la première phrase du refrain doit être chantée d’un seul souffle. C’est ainsi qu’on mettra en valeur le rapport au texte. Voici l'enregistrement.

Dans la mélodie, on peut noter également que le mi n’est pas entendu, un peu comme dans l’introït Requiem, ce qui montre que les mélodies populaires sont souvent plus proches des mélodies grégoriennes que les pièces classiques écrites.

Les cantiques XIXe

Au 19e siècle, la production de cantiques, pour les pèlerinages en particulier, fut très importante. Le P. Lambillotte (1797-1855) composa plusieurs recueils : 4 volumes de Chants à Marie, un Choix de cantiques sur des airs nouveaux qui en regroupe 180, ainsi qu’un Recueil de chants sacrés. On dit que sa production a moins de valeur qualitative que quantitative. Il est probable, en effet, qu’il ait voulu produire beaucoup et que l’inspiration n’ait pas toujours suivi.

Les cantiques proposés ici sont bien connus C’est le Mois de Marie, incontournable pour l’autre mois de la Sainte Vierge, le mois de mai. Ainsi le fascicule servira particulièrement pour ces deux mois de l’année. La mélodie est sans doute plus ancienne. C’est lui qui nous donne également le cantique de consécration à la Sainte Vierge : “O Ma Reine”, dans l’air plus connu que nous proposons ici. Le chanoine Besnier propose un autre air. Les couplets sont nombreux, nous avons sélectionné les plus connus en ajoutant notre couplet 5.

Ces deux cantiques sont en mode majeur. On veillera à mener doucement la grande montée du couplet dans C’est le Mois de Marie en respirant après la fin de cette montée. Dans les deux cantiques le balancement du rythme en 6/8 ne doit pas être trop marqué afin de ne pas donner un effet barcarolle, qui peut être évité facilement par un crescendo continu vers le sommet et une descente progressive également.

L’abbé François-Xavier Moreau, curé de Sorigny en Indre et Loire, composa un certain nombre de cantiques pour les pèlerinages à Lourdes, en particulier le célèbre “Nous voulons Dieu”, pour le pèlerinage de la Touraine le 11 septembre 1882. Dans l’original, on notera des ajustements à la prosodie pour certains couplets avec des changements de rythme. Par la suite on a modifié les paroles pour éviter ces variations, c’est une perte regrettable, certainement.

Parmi les cantiques de ce prêtre, nous trouvons également “Quand vint sur terre”. La mélodie en est très simple et il se prête aux diverses circonstances. On veillera à ne pas couper à chaque vers afin de maintenir la ligne musicale. Ce cantique sera très facile à faire apprendre à une paroisse qui commencera par répondre l’Ave Maria en refrain, puis suivra les couplets grâce au fascicule. Voici l'enregistrement.

Le retour au chant grégorien

Nous avons déjà eu l’occasion de parler de cette redécouverte du chant grégorien au tournant du 19e – 20e siècle. Aloÿs Kunc (mort en 1895) participa aux travaux de restauration du chant grégorien : Congrès pour la restauration du plain-chant et de la musique d’Église en 1860 et Congrès européen d’Arezzo en 1882, sans oublier les revues qu’il fonda : Corona Sacra et Musica Sacra. Il composa plusieurs cantiques, le plus célèbre étant le “Pitié, mon Dieu”, composé pour l’inauguration de la Basilique de Montmartre. Tout comme le cantique présenté ici, “Reine de France”, la connotation triomphaliste est manifeste, elle marque l’époque de composition. Toutefois ces cantiques sont historiquement incontournables pour nous placer dans le sillage anti-libéral des catholiques du 19e siècle. En conséquence, il faudra réserver ces cantiques à la sortie de la messe ou aux processions et pèlerinages.

La Schola Cantórum est une des grandes figures de ce renouveau grégorien appliqué à la composition musicale. Nous avons l’occasion ici de présenter un cantique signé par l’un des fondateurs de la Schola, Charles Bordes (décédé en 1909) : “O Vierge Marie”. Il fonda également les Chanteurs de Saint-Gervais dans l’église il assurait la fonction de maître de chapelle. L’harmonisation du refrain ressort plus de l’harmonie romantique que des modes grégoriens, mais les versets litaniques sont plus simples dans leur facture et peuvent être harmonisés à la manière d’une litanie grégorienne. Voici l'enregistrement.

Dans le « Je vous salue Marie », dit de Chartres, de l’abbé Joseph Louis (à ne pas confondre avec le Je vous salue Marie des JMJ), la musique respecte plus le texte, comme en chant grégorien. On constate, en effet, que le rythme y est très libre, difficile à faire rentrer dans nos mesures classiques. C’est pourquoi on trouvera des écritures différentes et des interprétations rythmiques différentes, nous avons tâché de présenter la version commune. Ce cantique respecte aussi le mode de ré en évitant soigneusement l’enchaînement final de demi-ton do#-ré. Au contraire l’absence de sensible dans l’enchaînement do-ré lui donne une grande solennité (comme nous le disions dans la vidéo sur le sensible et la sensible).



Par l’abbé Louis-Marie Gélineau, prêtre de la FSSPX